Peux-tu me décrire ta fonction actuelle et en quoi elle consiste ?
Je suis le Managing Director du groupe Phicap qui est une société de gestion immobilière pour le B2B et le B2G (Business to Government).
Phicap a 3 lignes de service : le Property, le Project et le Capital. Depuis la création de la société en 2013, le but était de développer un « one stop shop » qualitatif. C’est-à-dire de proposer nos services de gestion immobiliers au sens large et ce pour tout type de projet (résidentiel, bureau, industriel, hôtelier, hospitalier…).
Ma fonction aujourd’hui consiste à assurer que tout fonctionne au sein de la société, à mettre en place et à vérifier les process, ainsi qu’à suivre les managers des différents départements. Je m’occupe également du business développement pour lequel je suis soutenu par les équipes.
Quelles sont les formations que tu as suivies ?
J’ai fait des études d’ingénieur civil en néerlandais à la VUB. Arrivé en licence, j’ai dû choisir une spécialisation. J’ai alors opté pour l’électromécanique qui était selon moi le plus difficile. Or j’adore aller vers le plus challengeant ;-). Je réussissais bien mais je me suis rapidement rendu compte que je n’adhérais pas trop à cet univers. Je trouvais tout ça trop abstrait. J’ai alors été voir le programme en construction que j’ai trouvé assez sympa. Les gens me semblaient aussi très sympas. Je me rappelle que c’est la première fois que je me suis dit que le plaisir pouvait parfois prendre le dessus sur les objectifs ;-). J’avais quand même un peu peur de m’enfermer dans un métier « d’expert » mais je n’ai pas voulu trop y penser et au final, je suis très satisfait de mon choix.
Pour ma 4ème année, je suis parti en Erasmus à Barcelone. Ce fut une expérience excessivement enrichissante. J’y ai découvert une approche beaucoup plus pratique, contrairement à chez nous qui offre une approche principalement théorique. Résultat des courses, alors qu’en Belgique je faisais des grandes distinctions, j’y ai connu mon premier échec ! Heureusement, j’ai pu représenter l’examen qui s’est au final très bien déroulé.
Par la suite, durant mon premier emploi, j’ai fait un post graduat à la KUL en immobilier. Quelques années plus tard, j’ai aussi suivi une formation en Corporate Finance à la London Business School. J’ai également suivi le parcours afin d’être accrédité IPI ainsi que celui pour être membre de la RICS.
Je n’ai jamais entamé ces formations avec un objectif de carrière particulier en tête. Que ce soit au travers des fonctions que j’ai pu occuper ou des choix de formations. Mon approche a toujours été la même : apprendre un maximum sur un maximum de sujets et d’outils.
Sur quelle formation te reposes-tu le plus aujourd’hui ?
Toutes et aucune à la fois. Ces formations m’ont plutôt donné un cadre et des réflexes mais je pense que la meilleure formation reste l’auto-formation.
Comment es-tu arrivé dans l’immobilier ?
J’ai toujours voulu être plus généraliste qu’expert afin d’avoir une vue d’ensemble des choses. Or je trouvais que comparativement à la construction, l’immobilier présentait un bon mix de technique, de financier, de commercial et de juridique. J’ai estimé que c’était fait pour moi.
Quel a été le moment clé de ton parcours ?
Mon expérience en Europe centrale chez CFE fut une période très inspirante pour moi. Alors que je n’avais que 27-28 ans, on me confiait plein de responsabilités importantes. Je côtoyais un milieu d’expats composé de directeurs belges et étrangers plus âgés et avec plus d’expérience. On se voyait beaucoup et on sortait souvent.
La devise de tous était « Work hard play hard ».
Toutes ces personnes m’ont clairement tiré vers le haut et m’ont fameusement boosté pour la suite.
A quel moment t’es-tu dit « maintenant je crée ma boîte » ?
Je n’ai pas vraiment eu pour objectif de développer une « boîte ». Par contre, j’ai toujours été habité par un besoin de « créer ». J’ai une certaine soif de faire quelque chose qui donne sens et qui apporte quelque chose aux autres, que ce soit des collaborateurs, des partenaires ou des clients.
Les choses se sont faites assez naturellement. Après avoir connu de chouettes expériences, principalement au sein du groupe CFE, où je suis resté pendant huit ans, je me suis retrouvé dans une situation où, après 1 an chez Whitewood, je ne me voyais plus réintégrer une nouvelle société et devoir à nouveau m’adapter à une autre culture d’entreprise. C’est à ce moment-là que je me suis lancé.
Quel est ton drive dans la vie ?
Mon drive est de créer des choses.
Mettre des choses nouvelles en place et voir que ça fonctionne. Je prends plaisir à travailler avec mes collaborateurs avec qui je partage mes idées parfois folles. Ils viennent d’ailleurs eux-mêmes avec de bonnes idées qu’on essaie de mettre en pratique.
As-tu eu des peurs dans cette aventure Phicap ?
Bien sûr ! J’ai connu plein de peurs mais abandonner n’était pas une option.
Pour l’anecdote, au début, je n’avais pas de bureaux. Chaque matin j’enfilais mon costume (au cas où je rencontrerais un prospect 😉 ) et j’allais travailler au Café de la Presse. C’était mon Headquarter. Chaque fois que j’avais un rendez-vous client, je m’assurais que l’entrevue se fasse dans leurs bureaux plutôt que dans mon QG. Mon credo était « fake it until you make it » (rire) !
Peux-tu me décrire un peu l’évolution de ton rôle au sein de Phicap au fil des ans ?
Au début, j’ai bien évidemment dû tout faire moi-même. Je n’avais pas beaucoup de clients, peu d’outils et pas de personnel. Il n’y avait pas de journée type. Je pouvais passer d’un rendez-vous avec un prospect pour conseiller un investissement immobilier de quelques millions d’euros, à une réparation de chauffage chez un locataire dont j’assurais la gestion du bâtiment. Je me rendais sur place, en costume bien évidemment, avec ma petite boîte à outils. Chaque tâche était aussi importante à mes yeux, car c’est ainsi que je voulais créer notre label de service de qualité.
Ensuite, lorsque j’ai eu mes premiers employés, j’ai dû gérer toutes ces personnes et me mettre dans un rôle de manager. Tout en suivant encore l’opérationnel. Vers le 5ème employé, je me suis rendu compte que je leur parlais sans filtre et que je devais faire attention. J’ai donc décidé de me faire coacher pour améliorer, non seulement, ma forme de communication, mais également apprendre à vivre et à travailler avec des personnes différentes de moi. Ce qui n’est pas toujours facile mais avec l’expérience, c’est très enrichissant.
La taille de la société fait que je suis ensuite entré dans une nouvelle étape. J’ai dû mettre en place un middle management avec qui je traite directement et que je laisse gérer leurs équipes respectives.
Phicap est aujourd’hui devenu un groupe suite à l’acquisition de 2 sociétés. Quels sont les changements que tu as dû opérer ?
Nous sommes aujourd’hui en pleine phase « d’intégration ».
Fin 2019, Phicap a racheté la société de Property Management Sogesmaint (qui faisait partie du groupe CFE). Au même moment, j’ai fait l’acquisition de la société de Project Management Amirato, ce qui nous a propulsé dans le top 10 des sociétés de Project Management en Belgique.
Afin de réussir cette intégration, on a mis en place un comité de pilotage. Le but était, dans un premier temps, d’auditer ensemble tous les process et outils respectifs, pour ensuite tout uniformiser. Ce ne fut pas une mince affaire. Il a fallu réfléchir sur le positionnement de la société, à savoir son branding, mais également sur la redistribution des rôles au sein de cette nouvelle équipe.
Dans ce genre d’exercice, que j’ai trouvé très enrichissant, énormément de questions sont remontées à la surface. Au-delà des questions très pragmatiques, on abordait également nos craintes, nos peurs. Cela s’est fait au travers de workshops, et ce, avec l’aide d’un coach externe afin de donner la parole à tous les membres du comité. Tout le monde s’est lâché, ce fut très bénéfique.
Cette étape a nécessité un travail titanesque que j’estime être réussi car nous n’avons perdu personne en cours de route, ce qui est rarement le cas lorsqu’on fusionne deux/trois sociétés.
Quel est ton secret pour avancer si vite et de manière si contrôlée ?
Je pense que le secret est le drive. Ce désir de vouloir créer quelque chose et de le voir grandir.
Est-ce que tu te fais accompagner pour aborder et concrétiser tous ces changements dans ta vie ?
C’est vrai que j’ai toujours eu comme réflexe de questionner ou de faire appel à des gens pour m’aider à avancer sur des sujets que je ne maîtrise pas.
C’est important de ne pas avoir peur de demander du conseil.
Les personnes d’expérience sont beaucoup plus accessibles qu’on le pense avec une volonté de vouloir aider de jeunes entrepreneurs.
Quelles sont les valeurs qui t’accompagnent dans ton quotidien ?
La base est l’éthique et l’intégrité. Ensuite vient la passion et la ténacité.
Qu’est-ce qui te déplait le plus dans le métier ?
De manière générale, c’est la malhonnêteté. Si c’est constaté, la personne est rayée à jamais.
Tu es papa de deux petites filles, comment fais-tu pour jongler entre vie privée et vie professionnelle ?
C’est avant tout une histoire de choix, d’organisation et de dialogue avec mon épouse. Nous avons mis en place une forme d’équilibre en fonction de nos projets respectifs. Quand il le faut, on revoit cela ensemble, en fonction des impératifs.
Le matin je me lève à 6h afin de pouvoir passer un moment avec mes filles, avant de démarrer ma journée de travail. Le week-end est dédié à ma famille et je m’occupe de mes filles.
Que fais-tu quand tu ne travailles pas ?
Rien 😉
Lorsque je ne travaille pas, c’est d’abord la famille. Lorsque je ne dois pas m’occuper des enfants et que j’ai un moment pour moi, j’aime être seul avec moi-même, ne rien faire et juste réfléchir.
J’aime aussi les grandes balades en nature ou à vélo (très à la mode durant l’année covid 😉 ).
De quoi es-tu le plus fier dans ton parcours ?
D’abord de ma famille !
Ensuite, ce n’est pas tant de ma boite mais plutôt des personnes de l’équipe. J’ai beaucoup de plaisir et de fierté de voir ces personnes évoluer et s’épanouir. Chaque fin d’année, j’organise, pour l’ensemble du personnel et leurs conjoint.es, une activité suivie d’un dîner. J’ai beaucoup de plaisir de voir tout ce monde réuni !
Comment vois-tu l’évolution de ton métier et du secteur ?
J’y vois deux choses :
La première est que, bien qu’on soit tous d’accord pour dire que l’immobilier reste encore la préhistoire, il y a une digitalisation manifeste dans le métier qui se renforce d’année en année et à laquelle il va falloir s’adapter.
La deuxième chose que j’observe sur le marché est la consolidation des services. C’est la raison pour laquelle j’ai opté pour une stratégie de rachat au sein de Phicap. En Property, il y a plusieurs petits acteurs et quelques grands. Les deux types ont leur raison d’exister. Dans ces deux catégories, certains tendent progressivement à vouloir se consolider afin de prendre plus de parts de marché. Dans notre cas, l’idée de grandir est de déployer nos offres de services d’une manière différente que les grands acteurs. En Project, il y a clairement une consolidation qui s’opère. Il n’y a pas un énorme acteur mais plusieurs moyens. Les petites boîtes de PM de 5-6 personnes fonctionnent très bien mais elles risquent de ne pas pouvoir attirer ou retenir leurs talents qui ont également une soif de voir leur société grandir.
En guise de conclusion, quel est ton prochain challenge professionnel et personnel ?
Après l’évolution que Phicap a connu ces derniers mois, je pense que mon prochain challenge est d’assurer le passage de « l’intégration » à « l’harmonisation ».
Parallèlement à cela, on continue notre croissance en se concentrant sur 3 axes :
- Continuer une croissance organique et étudier la possibilité de croissance via rachat (uniquement si cela complète nos services et que les cultures d’entreprises soient alignées).
- Poursuivre l’innovation au sein de la société avec un focus sur la suite de la digitalisation de nos outils.
- Last but not least : je compte solidifier la structure de la société en mettant un Advisory Board en place.
Entretien mené par Archibald
Remerciements à Michael Goldberg & Phicap